dimanche 3 avril 2011

Le Moulinoscope

Je m'éloigne de ma cuisine quelques instants pour vous encourager, si vous en avez l'occasion ce week-end, à aller faire un saut aux Subsistances, quai Saint Vincent à Lyon.
J'y étais vendredi soir en charmante compagnie pour assister à la représentation de la compagnie 2 rien merci. Le Moulinoscope, c'est le nom de cette étrange machine...

(photo : 2 rien merci)

Tout d'abord, on est invités, ou plutôt littéralement poussés, à nous approcher de la caisse pour y échanger nos tickets contre une noix, sous le regard hagard d'un monsieur au chapeau bancal et aux nippes trouées.
Le deuxième lascar nous demande d'entrer dans cette roulotte en se serrant s'il-vous plaît.
Chacun se voit alors remettre un oeil - en fait une petite lampe entourée d'un chiffon noir l'ensemble ayant l'air lointain d'un oeil. On se serre, on découvre dans tous les recoins des détails, des photos, des croquis savants, des objets insolites, un porte-voix articulé. La curiosité ne sait plus où donner de la tête.
On attend incertains ce qui va se passer.
La roulotte, à peine éclairée, nous plonge dans un autre monde. Un monde fantasmagorique, forain, rugueux mais attachant. J'ai l'impression d'avoir plongé dans le film Les triplettes de Belleville...
Et maintenant, le moment tant attendu, Ladies and messieurs dames... Vous allez voir fonctionner sous vos yeux ébahis, le.... Moulinoscope. Mais avant ça, il faut mettre notre oeil dans notre poche. On s'exécute en spectateurs dociles d'un spectacle inattendu qui ne ressemble à rien que l'on ait vu jusqu'à présent.
Le comédien enfourche l'engin comme un vélo d'un autre temps, attache une perdrix au-dessus de sa tête parce qu'il est superstitieux et c'est parti pour une séance de pédalage enthousiaste et loufoque.
Petite précision, sachez que le Moulinoscope ne fonctionne qu'une fois sur trois !
Et ce soir, il fonctionne ! Sous nos yeux effectivement ébahis.
Le vélo entraîne tout un mécanisme qui entraîne lui-même une roue qui entraîne une autre roue avec des lucarnes, des lumières, des dessins qui rappellent les petits dessins animés qu'on inventait en faisant glisser sous le pouce les pages d'un carnet ornées du même croquis avec juste un détail qui changeait d'une page à l'autre...
On quitte la roulotte, on rend notre oeil. Les dames se voient offrir une main solide pour descendre les quelques marches.
A quelques pas de là, la yourte. Entrera-t-on, doit-on rester devant ? Toujours aussi improbable, incertain. Laissons-nous guider.
Et notre guide est là. Ne prononce pas un mot. Tout est dans le regard, le geste. Je sens quelques personnes perdues ne se laissant pas aller au langage du corps. Pourtant, c'est évident, ce monsieur nous suggère d'attendre notre tour, de le laisser effectuer son petit rituel pour chaque paire de visiteurs, de monter les deux pieds dans la caisse en bois prévue à cet effet et de regarder la suite du spectacle dans la petite jumelle. Très clair, non ?!
Trois pas en avant, deux en arrière, deux petits tours de quelque chose qui ressemble à une crécelle miniature, notre hôte nous invite donc à monter dans notre caisse et à nous rapprocher des jumelles pour assister à la suite du spectacle.
Images en noir et blanc, petite musique des films muets.
Des escargots, sur le chapeau, sur le nez, partout. Des ambiances de marché, de rue, de l'absurde. Voyage sur place et enchanté, les deux pieds dans une caisse de bois.
C'est terminé ? ça s'est bien passé ? Oui. Mon sourire est figé, je sens mes yeux briller, nous sommes ailleurs. Alors suivez-moi...
Cette fois-ci, on va entrer sous la yourte aux allures de moulin à café géant.
Une légère odeur de sable chaud, un grand Moulinoscope trône au centre, un autre visage, un autre chapeau, d'autres mimiques... D'autres petits films d'un autre temps, projetés ici puis là les escargots sont toujours là, sur les chapeaux, sur les nez...

Un câlin forain du cristallin... Jolie conclusion à cette parenthèse enchantée.

FIN

Des comédiens rudes mais bienveillants, des mots rares mais choisis, des mimiques, du jeu, tout était harmonieux, évident quoique déroutant.
On nous sert la pince. Tout s'est bien passé ? Très bien merci.

Ce fut pour moi une belle transition, cette nuit un peu spéciale qui m'a éloignée un tout petit peu plus de mes trente ans pour me rapprocher des 40...

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